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Le nom, ça vient d’un char de Carnaval que Fabien Lefèbvre avait dessiné, il y a 25 ans. Il était tout noir, ça paraissait donc parfaitement logique de l’appeler « La vie en Rose ». C’est devenu par la suite un collectif d’artistes, réalisant des expos, participant à des festivals, etc. mais l’association se concentre désormais chaque année sur la construction d’un char au hangar de la Parfonterie.

On retrouve un peu la même équipe que pour la Nuit des Soudeurs, une dizaine de membres actifs, leurs derniers projets étant le char de Carnaval 2018 et le bal / concert, avec au programme, les Shampouineuses du Gers, Dust et un Dj set.

Le char véhicule également des idées (haha), il permet de sensibiliser les gens sur des sujets d’actualité de façon parfois corrosive, avec un certain engagement mais toujours une bonne grosse dose d’humour. Comme la grande roulotte l’année dernière recouverte de fringues, qui servait à évoquer l’exil et l’immigration, l’Etoile Cirée jouait sa musique sur l’engin.

Fabien a pendant longtemps été chef de char mais il a transmis récemment le flambeau à Simon Saussaye.

En terme de financement, il existe une subvention du comité d’organisation, mais il faut trouver des solutions complémentaires, notamment en mettant en place des événements comme « le bal à tout le monde ».

Un de leur char appartient au MUCEM et ça aurait vraisemblablement donné un coup de pouce pour que Carnaval figure au Patrimoine Immatériel de l’Humanité de l’Unesco.

« Ce qui est marrant » me raconte Fabien au milieu du Bazar, les yeux pleins de la malice des enfants qui ont joué un bon tour, « c’est que nos chars on ne peut pas dire qu’ils soient toujours léchés, celui-ci était crade, il s’appelait Travailler plus, » c’était à l’époque de l’élection de Mr Kasstoipov’con.

«C’était un char amusant mais esthétiquement… plutôt… je ne sais quoi… Il a été acquis par le ministère de la culture», c’te blague ! Il me montre une photo, et renchérit: « déclaré patrimoine national » cette petite usine à roulettes avec des slogans écrits partout ! Un grand moment pour La Vie en Rose ! « C’est une boîte spécialisée dans le transport d’œuvres d’art qui est venue avec un camion surbaissé pour une vieille 304 avec un cardan foutu. C’était assez comique de voir les gars débarquer avec un sarcophage pour le protéger, z’ont mis des feutres pour pas l’abîmer, en gros c’est comme s’ils transportaient la Vémus de Nilo, nous on était morts de rire ». Y a même pas eu moyen de modifier quoi que ce soit pour que ça passe sous les ponts, « Patrimoine national » on ne touche à rien… bon ! Vendu 1 000 euros, ça nous a permis de racheter une moissonneuse batteuse pour la suite. »

Il évoque également le Char Noir des « fameux » dictateurs de l’histoire, qui roulait en diffusant du Wagner, la Vie en Rose est décalée et aime déconner en dénonçant, le but étant cette fois-ci de sensibiliser l’opinion publique sur la question de la liberté d’expression.

Il considère que « 5 à 10 pour cent des gens comprennent les conneries qu’on a faites, les autres… bon… conclut-il, on ne peut pas plaire à tout le monde. »

« Une année on avait recréé une camionnette genre transporteurs de fonds, tellement bien faite, que les flics nous ont arrêtés pour contrôler nos papiers, mais pour de vrai, ils déconnaient pas, vous n’avez pas de papiers, descendez, évidemment, y’avait pas de portes, le truc était en contreplaqué, on lui dit, c’est Carnaval, vous allez voir débarquer plein de trucs à roulettes bizarres, y’a des chances qu’ils z’aient pas leurs papiers non plus. »

Un appartement mobile tout pouilleux mais bon marché, des grues, des trucs en land art, d’autres à la Mad Max, on l’a même fait à pied une fois, et en 1994, il défilait en pape en bénissant la foule, « J’avais préparé une Papa-Mobile, mais impossible de la démarrer le matin, j’ai construit un char en une heure sur mon break, là j’ai fait scandale, j’avais la trouille, j’ai aussi failli me faire péter la gueule un jour où j’étais déguisé en Hitler! ».

 

La vie en rose, « contre l’ordre et la discipline », par Guiohm.

Texte publié initialement dans l’adulable fanzine Antirouille (merci à eux)